19 JANV.
2023

La Fontaine,écrivain éclairé par les astres

Jusqu’au milieu du XVIIe siècle, les connaissances en astronomie restaient confidentielles, seuls quelques cercles scientifiques connaissaient les découvertes de Copernic et de Galilée rédigées en latin savant.

Jean de La Fontaine fréquentait les salons de la très cultivée Madame de La Sablière, sa chère protectrice. Elle protégeait aussi un homme de sciences, François Bernier médecin et grand voyageur qui possédait un savoir important en astronomie. Elle lui demanda donc de lui écrire un abrégé en langue française sur toutes les connaissances coperniciennes.

La Fontaine était donc parfaitement au courant de ces découvertes et avait appris que la terre n’était pas le centre du monde mais au contraire une planète tournant sur elle-même et en ellipse autour du soleil.

Il faut imaginer qu’en ce XVIIe siècle, la pensée magique est prédominante. Les astres étaient toujours le signe de quelque chose dans la vie des hommes. C’est ainsi que l’astrologie et l’astronomie se confondaient : l’astrologue est à la fois un scientifique, un médecin, un mathématicien et un astronome. Pour pouvoir prédire l’avenir il faut connaître les astres et leurs « influences ». D’ailleurs comme le voulait la tradition, à la naissance du futur Louis XIV plusieurs astrologues dressèrent son horoscope. On lui remit également un talisman ayant le pouvoir d’attirer les influences célestes bénéfiques.

Alors que le système astrologique étayé par la tradition est toléré par l’Église car jamais placé au-dessus de Dieu, les découvertes de Copernic et Galilée furent accueillies fraîchement, en effet, l’homme et la terre n’étaient plus au centre de l’univers.

Sensibilisé à l’art de l’astronomie, La Fontaine tourne en ridicule les charlatans, devins et autres sorciers. Il écrit la fable L’Astrologue qui se laisse tomber dans un Puits, une satire des sciences divinatoires. L’Astrologue est appelé Pauvre bête et La Fontaine nous fait partager ses propres connaissances scientifiques :

Le firmament se meut ; les astres font leur cours,

Le soleil nous luit tous les jours,

Tous les jours sa clarté succède à l’ombre noire.

Influence des astres sur les saisons et non pas sur l’avenir des hommes.

Charlatans, faiseurs d’horoscopes,

Quittez les Cours des Princes de l’Europe.

On ne peut être plus clair.

Grâce aux progrès faits dans le domaine du polissage des verres, on invente des systèmes optiques qui arrivent à grossir jusqu’à trente fois. Les lunettes astronomiques vont avoir alors un succès fou et elles seront à la mode dans les salons et à la cour, d’où la fable Un Animal dans la Lune. La Fontaine s’y moque des gens trop crédules qui pensent voir un monstre dans la lune "Qui présageait sans doutes un grand évènement(..) Et chacun de crier merveille,/ alors qu’il ne s’agit que d’une souris coincée entre les verres...

La Fontaine met en vers la théorie de Copernic : L’ignorant le croit plat (le soleil), J’épaissis sa rondeur ;/ Je le rend immobile, et la terre chemine./ . On apprend à cette époque que l’univers est une étendue sans limites, que la terre n’est qu’une planète comme une autre et surtout que le destin de l’homme ne peut être gouverné par les astres.

Mais l’astrologie ne sera jamais vraiment disqualifiée: toute la société continue, quelque soit sa position sociale, de fréquenter les astrologues. La Fontaine nous en donne la description dans sa fable Les Devineresses :"Femmes, filles, valets, gros Messieurs, tout enfin,/Allait comme autrefois demander son destin/"

Il nous décrit avec humour toutes les techniques du charlatanisme.

La Duchesse de Bouillon, quand elle ne résidait pas à Château-Thierry, courait tous les lieux à la mode et notamment les devins faiseurs d’horoscopes. Ceux-la mêmes qui interrogeaient les astres pour retrouver des objets, connaître les sentiments d’un amant ou vous rendre invulnérable sur le champ de bataille. Ils vous fournissaient en philtres d’amour, Madame de Montespan en fit probablement avaler une grande quantité à Louis XIV.

Il y eut aussi des poudres de succession qui vous débarrassaient d’un vieux mari gênant ou d’un parent fortuné qui aboutira à la fameuse affaire des poisons. La duchesse fut éclaboussée par ce scandale, elle dut partir précipitamment de Paris et s’exiler pour échapper à la prison.

Au XVIIe siècle, l’univers est à repenser, le ciel à recréer dans son immensité, tous les repères anciens ayant disparu. Le temps où les savants pensaient que les anges poussaient les planètes est révolu. Quant au déterminisme astral, il est mis en pièces par les découvertes scientifiques. La Fontaine apporta sa contribution aux progrès des sciences astronomiques, écartant avec ironie l’astrologie, mettant en vers ses connaissances éclairées avec son lyrisme délicieux.

Vous pouvez lire également la fable L’Horoscope qui fait partie de ses 4 fables écrites sur ce sujet.

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